Le don et le métier

Texte de Guillaume Beaugé, peintre

Utrillo Maurice, Rue du Mont-Cenis, 1914, huile sur carton parqueté, 76 x 107 cm, musée de l'Orangerie, Paris

Utrillo Maurice, Rue du Mont-Cenis, 1914, huile sur carton parqueté, 76 x 107 cm, musée de l’Orangerie, Paris

Suffit-il d’être doué, d’avoir des possibilités, même grandes, pour faire de la peinture ?
Je ne crois pas. Si l’on étudie sérieusement le parcours de peintres qui ont accompli quelque chose de valable, on s’aperçoit très vite que les influences, les rencontres déterminantes, et parfois, le travail avec les aînés (même chez le Douanier Rousseau, Utrillo et d’autres) ont toujours donné un bagage supplémentaire qui permettait d’exploiter au mieux le don personnel… Je ne parle pas évidemment des ateliers anciens, où I‘apprentissage était systématique…

Ce don, cette aptitude doivent être éduqués, en quelque sorte ?
Si I’on appelle « éduquer », un simple apprentissage technique manipulatoire, une information d’histoire de l’art, ou une gymnastique intellectuelle, ce terme ne convient pas : en effet le métier, c’est sûrement un peu de tout cela, mais quelque chose de plus, et beaucoup plus formidable !

Vous m’intriguez !
Eh oui, il y a un côté et une capacité initiatique dans I’art, qui a toujours existé depuis Lascaux, et qui se transmet toujours, d’ailleurs on pourrait I ‘appeler « la vraie tradition », mais ce terme a un telle mauvaise presse qu’il vaut mieux ne pas l’employer. Il serait mal compris… surtout à l’heure actuelle !

Goya Francisco, De que mal morira ? 1868-69, eau-forte et Aquatinte

Goya Francisco, De que mal morira ? 1868-69, eau-forte et Aquatinte

Pourrait-on parler d’une « réflexion » vis-à-vis de son propre travail ?
Oui, d’une réflexion qui se fait, comme dit Cézanne, le pinceau à la main, et surtout au contact des maîtres et des aînés. Il faut dire avant tout, que si la tradition est élevée en dogme, elle est au plus haut point insupportable et malfaisante, car elle fait de l’élève un épigone, une victime culpabilisée… Si elle bien comprise, et surtout, fortement désirée, elle ne gêne en rien l’éclosion d’un tempérament, et j’ajouterai qu’au contraire, elle la favorise et donne toute sa puissance… L’apparition révolutionnaire de Manet implique une référence consciente, ou non à Goya, non par le choix du sujet ou de l’ambiance espagnole fort voisine, mais par la conception simultanée et frontalisée de l’expression, qui se retrouve notamment, dans les estampes du peintre madrilène… La naissance d’un style est toujours un événement magique, complexe, échappant à l’analyse, mais les impératifs de métier (qui prennent racine dans l’efficacité obligée de l’image), y sont souvent pour une part importante.

Revenons, si vous le voulez, à notre métier. Évidemment, on ne peut pas le définir ?
Peut-être pourrait-on le faire par la négative et dire que quand il n’y est pas, cela se voit… malgré toutes les qualités, et le travail présenté ne tient pas… On sent qu’il y a un don inexploité, et qui ne s’édifie malheureusement pas en œuvre, qui reste à l’état embryonnaire…Une image, si vous voulez, une image qui reste lourde, insistante, sans âme… une image figurative ou abstraite, naïve ou brute, là n’étant pas le problème…

Braque Georges, Femme à la guitare, 1913, fusain et huile sur toile, 130 x 73 cm, Centre Pompidou, Paris, France

Braque Georges, Femme à la guitare, 1913, fusain et huile sur toile, 130 x 73 cm, Centre Pompidou, Paris, France

Mais tout cela est-il si intentionnel que cela ?
Oui et non… Picasso précise bien que Braque et lui-même, n’ont à aucun moment voulu créer le cubisme. Ils ont obéi à leur instinct qui cherchait cet espace, à la fois architectural et proche, mais se sont fortement appuyés sur Cézanne et l’art africain. Bien entendu il faut préciser qu’à l’âge de 25 ans environ, ces deux jeunes peintres avaient déjà une expérience picturale importante, de presque 10 ans, qui les avait fait passer par des parcours variés, mais d’une très haute tenue de métier et d’inspiration…

Arrêtons-nous, si vous voulez, sur ce terme ; qu’appelez-vous « tenir » pour une œuvre plastique ou picturale ?
Une image picturale « tient » quand elle se loge parfaitement dans sa surface, qu’elle est au maximum de son intensité, et qu’elle est créatrice d’un espace pictural…

Si vous le désirez nous allons prendre successivement ces trois points les uns après les autres, prenons le premier point :
oui… Tenir dans sa surface et son format, suppose que l’image picturale est une image non seulement expressive ou émotive, mais bâtie… une expression bâtie. On peut dans ce cas, parler d’une architecture du format, ou du bloc, pour la sculpture. Même si l’expression se résume à une simple écriture, cette écriture doit se constituer sur une architecture de surface et de masse.
Je précise bien que cette architecture n’est pas une construction, pour faire la différence, je dirai que la première est intuitive, organique, émotionnelle, vécue, et que la deuxième est froide calculée, sans vie. Pour résumer, la première est trouvée, et la deuxième est pensée et n’entre pas en ligne de compte… car elle est seulement mentale.

Vous voulez donc dire qu’il doit exister une certaine structure ?
Absolument. L’image picturale vivante, comme tout organisme porte au plus profond de son mode d’existence, sa structure interne… Cette charpente n’est en rien extérieure, elle naît du plus profond de son intimité, elle est consécutive à son apparition… Si cette structure est par trop calculée, elle deviendra une construction extérieure, plaquée, froide, maniérée, dont l’effet sera négatif… La première cellule vivante est déjà organisée en apparaissant.

Braque Georges, Barques sur la plage à l'Estaque, 1906, huile sur toile, 38,1 × 46 cm, Metropolitan Museuml of Art New-York ©

Braque Georges, Barques sur la plage à l’Estaque, 1906, huile sur toile, 38,1 × 46 cm, Metropolitan Museuml of Art New-York©

Il y a, je suppose, des structures différentes ?
Oui, on peut même affirmer sans se tromper, qu’il y a autant de manières de structurer qu’il y a d’écoles, et même d’artistes… La structuration des Fauves et même du Braque fauve, n’est pas celle des cubistes et du Braque cubiste. On peut, si on le veut, classer les peintres en « familles » dont les deux plus importantes (en prenant garde à tout systématisme en ce domaine) sont les chromatistes (ou coloristes) et les mélodistes (ou valoristes) avec toutes les combinaisons possibles dans chaque cas particulier, exemple : Rembrandt, mélodiste, mais aussi coloriste, etc. Pour en terminer avec le bâti organique du tableau, je dirai qu’à la fin du travail, (et en ce cas seulement) il y a véritablement œuvre, on ne peut plus rien ajouter, ni rien retrancher. L’ensemble se prend d’un bloc, et tient d’une seule pièce dans le format. Cela est valable tout aussi bien, pour Soutine, Matta, ou Bonnard. Dans ce cas, le spectateur peut être véritablement comblé et une émotion esthétique avoir lieu, car la vision ne souffrira d’aucun manque, ni restriction. La vision semblera totale, parce que large, grande, généreuse, et sans aucune ambigüité. Tout le monde a dans son souvenir cette émotion là devant la grande œuvre… un jour ou l’autre.

Ne serait-ce pas cela, l’esthétisme de l’œuvre ?
Oui, je crois bien. Il semble que la séduction ne provienne jamais ni d’un sujet, ni d’une mode, ni d’un choix de thème ou d’inspiration, ni d’une démarche, la plus audacieuse soit-elle, mais plutôt au niveau de I’œuvre réalisée. Cela permet d’apprécier autant une statuette polynésienne, un portrait de Titien, une estampe de Goya, ou une œuvre de Klee…

Klee Paul, Villa R, 1919, huile sur carton, 26,5 x 22 cm, Musée des Beaux-Arts, Bâle

Klee Paul, Villa R, 1919, huile sur carton, 26,5 x 22 cm, Musée des Beaux-Arts, Bâle

Il ne semble pourtant pas y avoir de point commun dans ces œuvres ?
Bien au contraire… leur point commun est d’être un œuvre, c’est-à-dire un objet, à la fois très cohérent et très complexe, au maximum de son intensité… La connaissance du métier permet justement de déceler cela chez les autres, sous l’image apparente, et de l’exiger plus ou moins dans son travail, à sa propre mesure évidemment, ce qui est loin d’être facile, j’en conviens !

Passons, si vous le voulez, au second point : maximum d’intensité.
On comprend que cela n’est qu’un corollaire du premier : si l’image finale est organisée, globalisée au maximum, elle sera d’autant plus percutante, car toutes les parties ramenées à un seul ensemble auront bien sûr, l’efficacité maximum. Le tableau se transforme en quelque sorte en un piège du regard, car celui-ci peut se promener en toute quiétude dans un ensemble varié, mais cohérent… Un monde clos… Mais ouvert cependant, par l’espace qu’il engendre, et ce sera le troisième point. Pour compléter le deuxième, j’insisterai sur la nécessité d’une mise à plat de l’image et de la composition…

Que faut-il entendre par « mise à plat » ?
Pour que le tableau ait l’efficacité maximum, il est nécessaire qu’il soit frontal, travaillé frontalement…

Il faut donc bannir la troisième dimension ?
Dans le processus de composition et au départ, cela semble impératif ; si L’on pense que tout effet de profondeur a un résultat dissolvant pour l’efficacité de l’émotion à transmettre, il est préférable de la mettre momentanément de côté, Nous l’avons bien vu au siècle précédent, avec Cézanne et Manet. Les faux disciples de David et Ingres, organisés en écoles conséquentes, avaient par une compréhension édulcorée et superficielle de ces maîtres, converti en principes indiscutables, tous les procédés du modelé en valeurs, de la ronde-bosse, de l’étagement en plusieurs plans, selon les lois « sacro-saintes » connues… L’académisme, la froideur, et l’inhumanité obtenues ont obligé les peintres les plus doués de leur époque à réagir vigoureusement, risquant leur carrière : Cézanne, Manet, Puvis de Chavannes, Gauguin, puis plus tard, Matisse, Picasso, Braque affirmèrent vigoureusement la frontalité du tableau, pour retrouver l’expression et la fraîcheur originelle… Tous les grands mouvements modernes, nabis, fauves, cubisme, orphisme, futurisme, art abstrait européen et américain, retrouvèrent chacun à leur manière par un réflexe sain et salutaire, la vigueur de I’invention picturale expressive… on connaît bien maintenant les chefs d’œuvre qui en découlèrent, et détrônèrent rapidement les productions d’académiques arrogants qui avaient confondu création d’espace et illustration…

Mais le cubisme n’est-il pas lui aussi, une recherche de profondeur ?
Plutôt d’un espace architectural en bas-relief, intimiste, proche et tactile qui présuppose lui-aussi, une brisure des volumes, une fragmentation générale pour faciliter I‘organisation architecturale très affirmée de la surface. Si dans la même optique, les Fauves obtiennent un placage coloré intense, les cubistes échafaudent une trame architecturale, à la fois dense et aérienne, un bâti qui évite les trous en profondeur, ou plutôt les neutralise par un jeu syncopé d’avant en arrière, de chauds et de froids qui s’équilibrent… Le collage, amené par Braque, est un effet supplémentaire pour ajouter dans cette trame austère, un registre de colorations et de matières qui faciliteront le retour du signe poétisé de l’objet…

Braque Georges, La guitare, statue d'épouvante, 1913, fusain, gouache, papiers collés, 73 x 100 cm, Musée national Picasso, Paris

Braque Georges, La guitare, statue d’épouvante, 1913, fusain, gouache, papiers collés, 73 x 100 cm, Musée national Picasso, Paris

Et à la Renaissance ?
Le phénomène est identique ; si la renaissance se confirme par l’élaboration d’un espace théâtral et scénique à trois dimensions, les plus grands artistes ne se laissent pas prendre au piège d’un espace qui pourrait être stérilisant. Si l’on étudie de très près les plus grandes œuvres de Vinci, Titien, Tintoret, Véronèse, on s’aperçoit vite que la dite « perspective », n’est en rien un principe unique de construction de l’espace, qu’elle est surtout un apport décoratif important, mais non structural. Les trouées sont la plupart du temps « compensées », c’est-à-dire ramenées vers I’avant du tableau pour combattre cet effet dissolvant de I’espace, et réaffirmer le choc émotif et compositionnel…

Mais pourtant, il y a bien création d’un espace troué ?
Oui, bien entendu. Mais n’oublions pas que ce modelé et ces percées sont dues autant à une science des valeurs, qu’à une mise en place des perspectives linéaires. Si la Renaissance est le siècle de la découverte, de la théorisation, et de la mise en pratique de la sacro-sainte perspective, on oublie qu’elle est autant, sinon plus, celui de la découverte des relations lumineuses autour d’un volume dans l’espace environnant, et des différentes relations d’une composition à plusieurs volumes dans l’espace… La conjugaison des deux donnera jusqu’au 19e siècle, de Vinci à Poussin, les baroques, les maniéristes, le 18e, Delacroix, Courbet, Gros, Géricault, etc. L’expression d’un grand art dit « classique », où l’emploi de divers moyens permet ll’expression d’un espace dit « ouvert » mais, où aussi, (il nous est forcé de le reconnaître) la grande expression n’est pas forcément toujours présente… En effet, il suffit de comparer « la décadence des Romains » de couture (exemple d’une tradition académique mal comprise) et « l’Enterrement à Ornans » de courbet, pour être frappe par l’évidence d’une tradition décadente chez le premier, et d’un génie, chez le second, ayant réaffirmé par I’instinct, la puissance de I’expression plane sur la surface…Et c’est bien là, où nous voulons arriver : les peintres les plus talentueux et les plus instinctifs (Delacroix, Chardin, courbet, Manet…) n’ont jamais sacrifié à la modulation lumineuse, le grand esprit structural et hautement expressif de la composition plane et frontale.

Courbet Gustave, Un enterrement à Ornans, 1849-1850, huile sur toile, 315 × 668 cm, Musée d'Orsay, Paris

Courbet Gustave, Un enterrement à Ornans, 1849-1850, huile sur toile, 315 × 668 cm, Musée d’Orsay, Paris

Cet esprit structural, quel-est-il ?
La profondeur du tableau n’est en fait qu’un moyen d’agrandir l’espace pictural (notre troisième point !) offert au regard du spectateur, elle permet d’y loger une quantité plus grande d’information, et surtout d’y raconter une histoire le plus souvent héroïque ou épique. Elle ne peut en aucun cas, malheureusement contribuer à provoquer le choc pictural, que seules une simplification et une partition simple de la surface peuvent créer…

On voit donc que le tableau est le théâtre de deux antagonismes : une force simplificatrice nécessaire, ramenant chaque élément au plan vertical efficace du tableau, créant un choc visuel considérable ; et une force d’éclatement des intensités permettant la multiplication de l’espace…
C’est tout-à-fait cela… une force centrifuge, comme en physique, et une force centripète, l’une n’excluant pas l’autre, mais les deux devant coûte que coûte, s’exalter sans se détruire et contribuant au fonctionnement de l’œuvre d’art… Pour nous, la prise de conscience du métier se situe principalement à ce niveau, et si l’enjeu est difficile à comprendre, il n’en est pas moins considérable…

Courbet Gustave, Louis Gueymard dans le rôle de Robert le Diable, 1857, huile sur toile, 148,6 x 106,7 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York, Copyright de l'image ©Metropolitan Museum of Art

Courbet Gustave, Louis Gueymard dans le rôle de Robert le Diable, 1857, huile sur toile, 148,6 x 106,7 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York, Copyright de l’image ©Metropolitan Museum of Art

On peut donc situer ici, le métier ?
Celui-ci demeure très vaste et très varié, mais cette partie est probablement le noyau « dur » de la tradition picturale, bien comprise et vivante c’est-à-dire, qui n’enferme pas sur une pratique exclusivement artisanale mais ouvre au contraire l’esprit aux vraies recherches des artistes de chaque époque sur la qualité fondamentale de leur art  indépendamment de leur thème et de l’inspiration.

 

Toujours plus de Guillaume Beaugé ?

Guillaume Beaugé, Métaphysique des traces, collection Paroles de peintres, éditeur Monts-Désert & Pierre-Jean Brassac, publié en mars 2019 — extrait : p. 56-65
N’oubliez pas de citer vos sources

Guillaume Beaugé, Du torrentiel dans l’art… collection Paroles de peintres, éditeur Monts-Désert, publié en mai 2017

La page wikipedia consacrée à Guillaume Beaugé
Le site de Guillaume Beaugé

4 réflexions au sujet de « Le don et le métier »

  1. Sallantin marie

    Très intéressant . Je suis d’accord avec cette approche exigeante et précise et je vais le dire avec une image, celle du tableau qui est au départ une surface morte ( bois, tissu) et qui viserait son contraire, tout en étant au final quand même un tableau accroché au mur. S’il parvient à ce coup de force et que sa surface dissimule une machine explosive – car comme dans l’univers , la peinture cherche une résonance avec l’énergie et la beauté de la nature, donc avec la Vie., le tableau «  remue le fond sensuel des hommes ».
    L’habitué des musées , ces lieux soit disant poussiéreux!! , sait faire le distinguo que cet interview désigne , entre œuvres mortes et vivantes.. chefs d’œuvres et croutes.

    Parfois le peintre y laisse sa santé mentale ( à force de louper l’opération) , mais au moins il essaie. D’autres fois il lui arrive d’être passeur, à son insu. Dans tous les cas, cela demande une patience de guetteur….un travail sur le long terme pour un lâcher prise. Beaucoup de remises en question ….et de la puissance.
    Un art tranquille et trop maitrisé passe complètement à côté et finalement nous ennuie vite. C’est bien ficelé mais c’est même pas né. Souvent le peintre en est satisfait et fier. Le symptôme est qu’il s’imite à n’en plus finir sans s’en apercevoir . Les exemples sont nombreux. …dommage vraiment quand c’est prometteur au début.

    http://www.sallantin.fr

  2. Marion Bremaud

    Même si le langage fleuri de ce texte m’a troublé dans mon effort d’en tirer une synthèse, je pense en avoir saisi l’insaisissable : que le chemin d’apprentissage du «métier» de peintre passe avant tout par une compréhension quasi-métaphysique ou instinctive de ce qui fait qu’une image puisse être « picturale » et que cette compréhension ne peut être nourrie et renforcée qu’au contact d’un maître ou d’un peintre averti. Il serait quasiment impossible pour un débutant de trouver son chemin sans suivre cette voie initiatique .

    J’ai eu un peu de difficulté en ce qui concerne le texte concernant la notion « d’architecture » et de « construction » mais la présentation de l’article sous forme de « question-réponse » m’a beaucoup aidé à canaliser l’essentiel et je crois avoir compris que au lieu de recourir à une composition trop pensée, on privilégierait un tracé instinctif, sinon l’image risque de paraître sans vie, stérilisée par une approche trop calculée.

    La peinture de la Renaissance se base essentiellement sur une composition rigoureuse, que les bâtisseurs ont pris en exemple, mais cette composition très calculée et très élaborée ne paraît en rien rendre froide ou stérile un » Flagellation du Christ » de Piero della Francesca.
    Nous découvrons ici un autre univers, dans lequel apparait peut-être moins de vie, mais certainement pas moins d’émotion et de profondeur.
    Ce qui rend surtout cette peinture si belle à part de la prouesse (pour l’époque) de sa perspective est certainement lié à ce que Guillaume Beaugé explique avec brio ; « la Renaissance, est aussi la découverte des relations lumineuses autour d’un volume dans l’espace environnant, et des différentes relations d’une composition à plusieurs volumes dans l’espace »
    Par ce traitement la scène dramatique y gagne en hauteur car le spectateur saisi par les lumières ressent un apaisement et non un douleur existentialiste.

    Là ou le drame pictural s’impose par contraste violent ou mouvements agités, il y a la place pour s’imaginer une approche plus spontané quand à la naissance de son architecture.
    On peut trouver en ce moment une vidéo sur Caravage en replay sur Arte disponible jusqu’au 10 mars, ce peintre peignait très rapidement et ne composait pas ses tableaux selon des règles strictes mais selon ses propres règles très instinctives.
    La composition y paraît pourtant ultra solide (voir « Caravage-dans les splendeurs des ombres » )

    Je suis quand même convaincu que les Maîtres en général connaissaient bien l’art de la composition et le pratiquait solidement avant de se lancer dans la peinture proprement dit mais tout est une question d’équilibre et mieux faut il en effet une tracé spontané qu’un composition rigide sous une peinture rigide.
    Guillaume Beaugé a bien raison qu’il fallait bien en finir avec l’Académisme lequel finalement n’a plus laissé de place à la spontanéité, la vie, la beauté et a étouffé le peintre naissant dans l’oeuf .

    Merci Guillaume Beaugé pour ce texte si enrichissant et aussi d’avoir évoqué «la nécessité d’une mise à plat de l’image et la composition » que j’ai pris pour une leçon.

    Marion Bremaud

  3. guillaume beaugé

    Merci, chère Marion… mais je ne cherche pas à donner des leçons ! (Je sais que tu l’as bien compris ) !! Un peintre ne peut parler que de ses propres convictions, concernant son métier ..Elles viennent de sa propre expérience, de son « initiation « , de ses relations avec les « oeuvres » du passé ..
    Chacun est totalement libre « , au pied de son mur « , car ce mur est un miroir qui renvoie non seulement a son monde intérieur d’une façon implacable,… mais aussi à la façon dont il l’organise… pour être au maximum de son efficacité …et toucher vraiment….
    Serait-il possible de travailler seul pour un débutant ..?? Je ne dis pas que c’est impossible , mais c’est souvent une question de temps ,car a-t-on vraiment le temps et la possibilité …et le génie …de tout comprendre l’essentiel dans les oeuvres importantes ..?? et de le faire repasser par l’oeil et la main, pour en faire un instinct qui va plus vite que la réflexion ???
    Car , malgré toutes ses « pensées », quand le peintre saisit son pinceau …., le pinceaui le dirige ….et non l’inverse …!!! Neuf personnes sur dix… croient le contraire .. !!!
    Guillaume Beaugé .

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