L’interview de Jean-Marc Trimouille

Jean-Marc Trimouille, Jardin, acrylique, 50 x 65 cm, 2018

Jean-Marc Trimouille, Jardin, acrylique, 50 x 65 cm, 2018. Cliquez sur les reproductions pour les agrandir…

Pour élaborer les interviews de cette publication, j’ai le plus souvent interrogé des peintres qui ont inscrit leurs pas dans ceux des artistes de la deuxième école de Paris.
Ces peintres ont des formations comparables et partagent une vision proche des enjeux et des qualités de leur discipline.
Cependant, ce n’est pas le cas de tous les artistes sollicités pour cette publication, et notamment de Jean-Marc Trimouille dont je vais faire l’article sans plus tarder.
Cela ne pourrait suffire à définir son travail, mais sa démarche s’inscrit plutôt dans une filiation avec les membres de l’école de New-York. Pendant un certain temps, je l’ai notamment associé à de Kooning, un de Kooning pacifié et non figuratif. Pourtant l’inspiration de Jean-Marc repose — il le précise dans ce billet — sur des réminiscences. Des réminiscences liées, comme il est finalement facile de le discerner, à la végétation, au jardin, au paysage… Ma première impression n’était donc pas la bonne. En voyant ces travaux, j’ai aussi éprouvé une sensation de fraîcheur, un peu comme s’ils étaient conçus et exécutés en un seul jet… Mais, ce n’est pas, là non plus, ce qu’il nous dit.
Passé ces conjectures, venons en à ce qui compte vraiment : l’interviewé à une vraie sensibilité de peintre, c’est un passionné. Je n’ai naturellement pas les moyens de vous délivrer la vérité nue et entière à propos du travail de Jean-Marc Trimouille. Cependant, au risque de vous infliger une séquence de termes relevant de la grammaire des couleurs, je ne peux résister à émettre un dernier commentaire. Durant la courte période, les deux années, où sont prises les toiles qui illustrent ce papier, on constate que l’artiste invoqué joue sur les oppositions diamétrales entre les « couleurs complémentaires » : le vert et le rouge ou/et le violet et le jaune. Je ne développerai pas ici la notion plus significative, mais plus délicate, des « couleurs imparfaitement complémentaires ». Quoi qu’il en soit, à coté de ses « contrastes simultanés » et, vraisemblablement, dans la recherche d’un équilibre entre les tonalités hautes et basses de la composition, Jean-Marc utilise des tons « rompus », c’est-à-dire des tons résultant du mélange des « complémentaires ». Dans ce régime tons vifs/tons rompus, il peut monter ses tons très hauts ou rester dans une coloration plus retenue, plus sourde.
Pour peu que l’on fouille sa collection, on trouve aussi de nombreuses toiles construites uniquement sur des rapports périphériques. Je veux dire par là, qu’il utilise un certain nombre de couleurs qui se succèdent sur le cercle chromatique, exceptées — justement — celles qui s’y opposent diamétralement.
En réalité, je doute fort que Jean-Marc vive dans l’obsession du cercle chromatique, il travaille librement, instinctivement, et utilise tous les tons. L’important étant bien sûr que les tons soient à leur place et fraternisent… Que demande le peintre, en effet, si ce n’est un « accord coloré » global ?
 

Jean-Marc Trimouille à La plus petite galerie du monde (OU PRESQUE), octobre 2018

Jean-Marc Trimouille à La plus petite galerie du monde (OU PRESQUE), octobre 2018

J.L. Turpin : quelle est ta formation ? As-tu, par exemple, fréquenté une école d’art ? Dans l’affirmative, quelle école et qu’y as-tu appris ?

Jean-Marc Trimouille : j’ai été à l’ENSAD, l’école nationale supérieure des arts décoratifs de Paris, c’est la sculpture qui importait pour moi alors, on y rencontrait des profs de bon conseil.

 

J.L. Turpin : dans cette école as-tu fait une rencontre providentielle. En d’autres termes, un professeur t’a-t-il ouvert  la voie étroite qui mène à la peinture ?

Jean-Marc Trimouille : par affinités, en marge de l’école, je me suis lié à des peintres de générations différentes, peintres qui semblaient partager un certain regard.
Ces gens avaient su cultiver pour eux-mêmes des rapports approfondis aux œuvres de grands artistes, ce qui m’intriguait car je ne comprenais pas comment cela était possible, comment ils s’y prenaient pour entrer en relation avec ce monde que pour ma part je connaissais mal.
J’ai saisi peu à peu que la transmission n’est rien d’autre que le bénéfice que l’on tire de l’observation de ceux qui possèdent un réel contact avec les choses en général, avec les œuvres en particulier, avec leur pratique bien sûr et que l’école est bien loin de suggérer cela. Celle-ci inculque méthode, techniques et érudition, ce qui peut nourrir une expérience personnelle mais quand à l’engendrer…

Jean-Marc Trimouille, De Bon Matin, acrylique, 92 x 73 cm, 2019

Jean-Marc Trimouille, De Bon Matin, acrylique, 92 x 73 cm, 2019

J.L. Turpin : quels sont les peintres qui t’ont influencé, à quel moment et dans quelle mesure ?

Jean-Marc Trimouille : pour répondre par le commencement, disons que j’ai pratiqué longuement la sculpture avec malgré moi un conditionnement de peintre car c’était là le milieu que j’avais trouvé, ce qui n’était pas sans incidences.
J’ai à plusieurs reprises désiré parallèlement au travail en volume, m’orienter vers la couleur mais je ne savais pas m’y prendre, j’ignorais comment travailler dans ce sens.
C’est lorsque j’ai étendu mon travail en dessin (peu coloré jusqu’alors) à la pratique du pastel sec que j’ai commencé à saisir émotionnellement à mon niveau, des notions d’ordre chromatique, de richesses de rapport des plans entre eux, de qualités de profondeur, de forme…
C’est ce qui m’a permis de commencer à regarder les peintres d’un autre œil et aussi d’entrevoir la possibilité d’une activité picturale sans plus me heurter à d’immédiates impasses comme antérieurement.
Les grands peintres classiques (c’est à dire tout académisme exclu, les deux termes classique et académique étant facilement associés, tort bien regrettable), qui demandent une fréquentation intense et régulière, sont d’un abord et d’un apport incomparable pour la formation du regard et donc pour répondre à ta question, d’une influence évidente. Ce qui pour moi en eux retient le plus l’attention est sans doute la puissance et l’intemporalité de leur pensée plastique (rien de cela naturellement dans l’académisme).
Par ailleurs l’“avalanche” créatrice du vingtième siècle, dont l’immense variété artistique constitue (comme pour beaucoup je pense) la plus riche production de nos proches horizons passés et qui reste sans doute pour une part significative la source de formulations actuelles ou émergentes, m’intéresse tout autant.

 

J.L. Turpin : peux-tu me donner le nom de quelques-uns des “grands peintres classiques” et des peintres modernes d’envergure auxquels tu te réfères ?

Jean-Marc Trimouille : je crois à la nécessité de les découvrir pour et par soi-même le plus possible, d’apprendre à les choisir, à les approfondir. Les gens un peu cultivés en matière d’art ont chacun en construction leur propre système de reconnaissance d’excellence vis à vis de la peinture, je dis “en matière d’art” et non en matière d’érudition, ce qui est très différent.
Tout réel amateur de peinture est par nature sélectif et sa “respiration” dans sa façon d’aborder la chose tient à la manière dont ses avis changent, se relativisent, se renouvellent. Ce sont ces balancements perpétuels, ces réajustements entre divers choix de peintres lui faisant signe qu’il lui faudrait pouvoir exprimer dans une durée, dans toutes les durées de son expérience et non se contenter de citer des noms mais cela n’est-il pas de l’ordre d’un dialogue intérieur qu’il faut savoir préserver ?
Bien entendu je peux dire que j’aime la peinture romane, que j’aime les primitifs français, que j’aime Watteau, que j’aime Delacroix et Manet, Braque, Bonnard, Marquet, Léger, Klee, Bram Van Velde, la peinture américaine et bien d’autres, voilà pour un nuage de noms, je préfère évoquer la manière dont j’essaie de m’approcher de ce qui constitue pour moi le ressort de telle ou telle œuvre, la manière de m’y appliquer par essais critiques. J’ai retenu par exemple les portraits de Maerten Soolmans et d’Oopjen Coppit de Rembrandt, La Mort de Chioné de Poussin, Jupiter et Antiope de Titien ou encore Henriette de Verninac de David où j’ai cherché à présenter une esquisse possible d’un chemin initié vers elles *.

(*) https://jeanmarctrimouille.wixsite.com/secretdurenard

Jean-Marc Trimouille, Entre deux portes, acrylique, 50 x 65, 2020

Jean-Marc Trimouille, Entre deux portes, acrylique, 50 x 65 cm, 2020

J.L. Turpin : des artistes incontestables, comme Nicolas de Staël et Giacometti, ont affirmé que ― d’une certaine manière, on peut peindre n’importe quoi. À chacun ses sources d’inspiration, ses sujets de prédilection. Quels sont les tiens ? Je pense ici aux éléments du monde visible ou d’un monde intérieur qui nourrissent ton travail.

Jean-Marc Trimouille : ils partaient de données visuelles objectives et les acclimataient à leur subjectivité, il leur fallait un point de départ, un sujet. Tout sans doute ou “n’importe quoi” pouvait à la longue leur convenir. Leurs perceptions aigües de la réalité leur permettaient d’engendrer un monde parallèle à celui du réel dont elles se nourrissaient, il n’était donc pas étonnant qu’elles puissent tout (ou presque) absorber.
Il y a déjà un écart important entre leurs chemins et les nôtres. Si c’est le milieu dans lequel on vit qui fait de nous ce que l’on est, les préoccupations des peintres ou créateurs en général de périodes que nous n’avons pas connues nous sont par définition distantes, quoique on en apprenne néanmoins beaucoup sur le sens des idéaux artistiques des périodes passées en se rapprochant des œuvres.
Mais quand à ce qui aujourd’hui identifie sur le plan artistique, les individus que nous sommes, au ressort de la pensée, que savons-nous de précis et que pressentons-nous comme indice en elle qui soit de nature à nous permettre d’agir nos rêves ? Dans l’hypothèse d’une ignorance collective probable à ce sujet, j’estime que le rapport des sensations que l’on éprouve au contact des choses a toute son importance (en tout cas dans un premier temps) comme guide intuitif dans le sens d’une création vivante, dans l’espace physique et temporel d’une recherche qui vaille…
Pour ma part donc, pas de sujet de prédilection ni de sujet tout court mais plutôt, chemin faisant, l’attente de quelque chose, de rencontres de hasard avec des sentiments ou des perceptions vécues dans des temporalités diverses, récentes ou très anciennes voire des perceptions ou des souvenirs imaginaires.

Jean-Marc Trimouille, Sans titre, acrylique, 65 x 50 cm, 2018

Jean-Marc Trimouille, Sans titre, acrylique, 65 x 50 cm, 2018

J.L. Turpin : peux- tu évoquer ton processus créatif ? Pour le dire autrement, quelle est ta démarche ou ton fonctionnement dans l’atelier et, le cas échéant, hors de l’atelier ?

Jean-Marc Trimouille : si il y a processus, il est précisément lié au fait que je n’ai pas de projet préalable.
Je sais que quand je me mets à l’ouvrage, ce qui résulte des premières approches aura des conséquences diverses à l’issue d’un certain nombre (très variable) de séances.
Ces conséquences ont à voir avec l’organisation des choses (je pense à ce qui se met progressivement en place) telle qu’elle ne se détecte pas au premier abord mais renforce constamment ce que l’on voit (du tableau).
Je peux dire que j’espère sans cesse la survenue d’une complexion sous-jacente qui nourrisse l’apparence. Ce qui m’intrigue, bien sûr est le lien qui s’établit entre les deux, si il est effectif, inattendu, original et non reproductible.

 

J.L. Turpin : toujours à propos de ta façon de travailler, de ta démarche, et même si cela peut te sembler un peu trivial, j’aimerais savoir combien de temps tu consacres à une toile, de son ébauche à son « aboutissement » — en moyenne bien sûr ou dans les cas les plus fréquents. D’autre part, quelle est, approximativement, la proportion de travaux gardés (aboutis ou simplement continués, non recouverts) par rapport à tous ceux que tu entreprends ?

 Jean-Marc Trimouille : je pense que le temps est au cœur du processus pictural, qu’il est lié à une situation qui se dessine peu à peu, que cette situation à divers stades de son évolution demande du recul, du temps précisément consacré par le regard à en déterminer les enjeux, selon quelles modalités, etc. Je n’entreprends pas une peinture seule mais plusieurs, chacune d’elles peut à un moment rester en attente à un stade des plus variables, il est rare qu’un nombre de séances qui se suivent de manière rapprochée s’affirme dans la foulée.
Il me semble que c’est donc (dans le cas favorable d’un tableau qui se met à exister) le temps qui consacre une toile et non le peintre qui lui consacre du temps.
Il y a bien sûr une proportion non négligeable de toiles qui ne tiennent pas dans la durée, par manque justement d’aboutissement, en prendre conscience peut permettre de réactiver en elles les choses, encore une question de temps… non quantifiable.
Je dirais qu’il y a deux invités dans cette histoire, le temps et soi.

 

J.L. Turpin : à ton avis, existe-t-il des critères qui permettent d’évaluer la valeur artistique d’un tableau ? En tout cas, quelles qualités cherches-tu aussi bien dans tes travaux que dans ceux des autres ?

Jean-Marc Trimouille : c’est un peu ce que je j’évoquais précédemment : une forme d’ensemble qui retienne l’attention, teinte d’une vision atypique des choses, pétrie par les sens, investie de “sur-présence”, une sorte de mission impossible…

J.L. Turpin : Depuis des décennies, la peinture souvent est présentée comme une forme d’art dépassée, sans véritable légitimité. Quel est  ton avis sur l’état du monde de la peinture, du monde actuel de la peinture ?

Jean-Marc Trimouille : l’Art contemporain a réellement généreusement pour principe (si j’en crois les écrits de quelqu’un comme Paul Ardenne) de ne pas accepter l’idée d’un encadrement préalable autorisé qui seul déterminerait les critères d’une expérience artistique.
Il offre le champ ouvert des possibles à tout un chacun vers la réalisation de soi par un biais qui reflétant une nature artiste, tente de qualifier le monde, une actualité de la pensée, etc.
Je ne vois pas en quoi une aventure picturale aujourd’hui dérogerait à cette offre. Ce n’est donc pas cette forme d’art qui est dépassée mais le questionnement sur sa légitimité…
Peut-être est-ce aussi un manque d’information quand à son actualité !

Jean-Marc Trimouille, Réminiscence de Walden, acrylique, 146 x 114 cm, 2018

Jean-Marc Trimouille, Réminiscence de Walden, acrylique, 146 x 114 cm, 2018

J.L. Turpin : Est-ce que la modernité, l’ancrage dans l’époque actuelle, te préoccupe ? Si c’est le cas, comment cette préoccupation se traduit-elle dans ton travail ?

Jean-Marc Trimouille : j’essaie simplement de m’approcher de ce qui me semble juste, pour le reste…

J.L. Turpin : la plupart des activités humaines supposent un résultat concret, quelque chose que l’on puisse mesurer. À ton sens, est-il possible de peindre sans autre objectif que d’agencer des surfaces colorées ? C’est-à-dire de travailler sans même se soucier du résultat, en cherchant juste à éveiller et à affirmer la vie du tableau ? En d’autres termes la peinture se suffit-elle à elle-même ?

Jean-Marc Trimouille : la vie du tableau est certainement primordiale mais comme elle est indissociable de la vie de son auteur par qui elle prend naissance, il ne fait guère de doute qu’il demeure (le tableau) essentiellement pour le peintre la constitution d’un miroir des tensions de soi qui lui permet d’apprendre un peu mieux à se connaître… tensions qui dénotent une chose fondamentale, les qualités de sa poétique s’il en est.

 

Interview de Jean-Marc Trimouille réalisé en juin 2020 pour sur-la-peinture.com
(le cas échéant citez vos sources)

 

Encore plus sur Jean-Marc Trimouille ?

L’adresse du site et blog de Jean-Marc Trimouille: https://jeanmarctrimouille.wixsite.com/jeanmarctrimouille

Le Face Book de Jean-Marc Trimouille est au nom de Jean-Marc Trimouille

4 réflexions au sujet de « L’interview de Jean-Marc Trimouille »

  1. Marion Bremaud-Boumans

    Merci pour cette nouvelle invitation à la réflexion sur la peinture et surtout pour le préambule sans lequel j’aurais sans doute eu plus de mal à comprendre la démarche de Jean-Marc-Trimouille.
    J’avais jusque’ ici compris qu’un peintre qui visite le Louvre s’‘approche des oeuvres pour en analyser les compositions : le dessin/peinture, volumes, lumière, techniques, une langage picturale.
    JMT dit dans l’interview que ce qui lui importe le plus est l’approche vers « la puissance et l’intemporalité de la pensée plastique» en évoquant des oeuvres des grands peintres classiques qu’on retrouve sur son blog dans le «secretdurenard».
    Comme je ne vois pas le rapport entre les toiles de JMT et les oeuvres des maîtres présentées dans blog en ce qui concerne les techniques de peinture, composition, palette de couleurs, valeurs etc., j’aimerais comprendre ce que Jean-Marc-Trimouille entend par « la puissance et l’intemporalité de la pensée plastique»
    Si JMT analyse les tableaux des maîtres choisis pour en tirer quelques chose pour son travail, il y a de quoi, je suis frappée par la puissance de ces oeuvres et l’émotion qui s’en dégage, la subtilité, l’élégance, c’est un bonheur (surtout Rembrandt). Elles ont une âme, celle du peintre.
    Je reste toutefois un peu sceptique sur ces références à « la puissance et l’intemporalité de la pensée plastique» en ce qui concerne la peinture de Jean-Marc-Trimouille.
    Je crois que JMT aborde les oeuvres des grand peintres classiques avec un regard de sculpteur (pas étonnant vu sa formation initiale de sculpteur). Il en apprécie les courbes, les pointes, triangles, les tracés constructeurs, les rythmes, les angles, les contre-points etc. mais il y a aussi une sensibilité musicale et émotionnelle dont on peut supposer trouver l’écho dans ses toiles.
    Mais, je retrouve dans ses toiles plutôt un écho de la peinture américaine abstraction- expressionniste des années 50 comme celle de Willem de Kooning surtout pour les couleurs, ça saute aux yeux (d’ailleurs de Kooning a lui aussi débuté sa carrière dans un école de décoration).
    Aussi on y retrouve la liberté évidente du tracé. C’est très physique aux fortes couleurs.
    Willem de Kooning, et ses contemporains américains ne se référaient pas beaucoup ou pas du tout aux maitres qu’on trouve dans des musées comme le Louvre — ils semblaient plutôt les fuir.
    Fréquemment les peintres contemporains, surtout les peintres abstraits, se réfèrent aux grands peintres classiques quant on les interroge sur leur démarche artistique et on a l’impression d’un effet de mode auquel le peintre se conforme pour donner plus du sérieux à sa démarche.
    Ce n’est pas le cas de JMT qui s’approche de ces oeuvres magnifiques et tentant de les analyser sérieusement pour y trouver un fil a suivre pour ses créations.
    Même si je n’ai pas trouvé l’évidence flagrant d’un facteur commun entre le monde pictural de Jean-Marc-Trimouille et celui de Rembrandt ou de David il n’en reste pas moins que que je suis attirée par sa peinture pour sa dynamique et sa force . Aussi c’est une peinture sincère qui ne cherche pas la facilité.

  2. Sallantin marie

    Je ne vois pas non plus de rapports entre vos peintures et – disons pour faire court – la grande tradition de la peinture Européenne. Par contre m’a aussi sauté aux yeux la filiation à l’abstraction lyrique venant des USA, la verve et l’audace de ces peintures hors limite . Elles ont beaucoup marqué les peintres et les marquent encore. Pourquoi vouloir citer EN PLUS les peintres classiques ? Je ne sais , mais le public n’est pas si sot et lorsque Koons est comparé à Titien par les gens de la com …comme la grenouille de La Fontaine son sort est fixé. Le « en même temps » cela ne marche pas !
    La question de Turpin sur la peinture jugée dépassée depuis les années 90 par les institutions françaises , et jugée telle à St Charles ( j’y suis passée pour le vérifier) et autres écoles d’art si elle n’est pas accompagnée d’un discours fleuve et alambiqué , est tout à fait pertinente et actée depuis longtemps par les sociologues ( Nathalie Heinich) et autres observateurs et enseignants tels Philippe Dagen comme on voit dans une courte vidéo qui les réunit au Sénat lors d’une table ronde sur la place de la peinture dans l’art contemporain en 2003 (Tables Rondes ArtSénat 2003) ! Ce fut d’ailleurs une grave erreur dont les conséquences ne sont pas encore évaluées . Il faudrait d’abord en convenir pour envisager un chantier de réparations dont on aurait tous à y gagner…
    Pourquoi tordre les faits ? C’est ma deuxième question….

    Lien vers la vidéo Tables Rondes ArtSénat 2003

    http://www.sallantin.fr

  3. Jean-Marc Trimouille

    Bonjour Marion,

    Je parle de ma formation parce qu’une question m’est posée à ce sujet. Je ne cherche dans les œuvres classiques aucun « fil à suivre », c’est peut-être l’effet ramassé des questions de cette entrevue qui prête à penser des choses de ce genre mais il me semble que ces questions sont tout de même bien dissociées entre elles ainsi que leurs réponses quand à ce qui est formation (cesse-t-on jamais de se former ?) et à quand à ce qui est travail de quelqu’un qui ne prétend déployer des qualités que de soi-même… Des influences, chacun en a, j’en évoque pour ma part plusieurs d’époques très différentes mais rien de tout cela n’interfère dans mon travail. Une entrevue prête à réflexion, à méditation, à évoquer la conscience que l’on se sent avoir, comme des liens que l’on entretient avec les choses, ce qui n’est en rien le cas dans un travail en action qui ne peut valoir que par une déprise indispensable de toute référence… je ne parle par ailleurs en rien d’une quelconque intemporalité à mon sujet, je ne suis pas anachronique à ce point !

    Bonjour Marie,

    Voici comment Philippe Dagen « parle de peinture » :

    « Après Poussin érotique, Poussin buveur
    Mais, pourquoi encore un Poussin, et pourquoi celui-ci ? Parce que c’est une œuvre de jeunesse de Poussin, peinte sans doute vers 1622, avant qu’il ne se rende à Rome, où il a passé l’essentiel de sa vie. Et parce que le sujet, pris dans Les Métamorphoses, d’Ovide, est plutôt rare : un drame de la jalousie chez les dieux. Chioné, fille de Dédalion, est si belle qu’Apollon et Mercure en deviennent les amants et qu’elle leur donne des jumeaux, nés ensemble, mais chacun d’un père différent. La jeune femme est si fière de ces hommages qu’elle se vante d’être plus belle que Diane. Laquelle, connue pour son tempérament vindicatif, la tue illico d’une flèche tirée dans la bouche. Elle transperce la langue de l’impudente.
    Tous ces éléments sont dans la toile : Chioné, nue, qui agonise, Diane qui vole au-dessus d’elle, l’arc à la main, les jumeaux éplorés, Dédalion atterré. La scène a pour décor un paysage boisé et sombre – jour qui tombe ou orage qui vient. Au centre exactement de la composition se place le sexe de Chioné, triangle noir très visible. Cette indécence surprend, si logique soit-elle au regard de l’histoire de Chioné et de ses amants. Du reste, attribuerait-on l’œuvre à son célèbre auteur, en l’absence d’archives probantes ? C’est un Poussin d’avant Poussin, d’un tragique fort appuyé. » Philippe Dagen – Le Monde 23 février 2016

    Pensez-vous que ce soit là parler peinture ? Par un descriptif exténuant dont le point d’orgue est une « découverte » censée émoustiller — c’est à dire détourner par un procédé terriblement usé — le lecteur et dont l’ensemble ne prête à strictement aucune réflexion d’ordre pictural ? (je n’en connais à ce monsieur par ailleurs aucune)
    Est-ce de gens de cette catégorie que vous attendez une validation sur une légitimité de la peinture aujourd’hui ?
    Belle brochette de prises de position sur ce qui n’est pour pour eux qu’une sorte de méta-sujet par les personnalités de cette séance Art-Sénat 2003 dont Philippe Dagen. Y évoque-t-on de quelconques enjeux de la peinture en tant que telle ? À mon sens, aucun, tout cela n’est que vague représentation de soi et mondanités… Sans intérêt au regard du sujet réel de la peinture… par ceux qui — sans autre bagage que leur diplômes et/ou leurs situations respectives dans un contexte purement théorique ou pour les « peintres présents » leurs productions singulièrement datées — tournicotent autour !

    J’ai fait également un court séjour à Saint-Charles, un peu plus que le temps d’apprendre par l’un de ses éminents professeurs que la réalisation des chapiteaux romans était pour ces gens d’alors « presque de l’art »…!!!!!!

    https://jeanmarctrimouille.wixsite.com/jeanmarctrimouille

  4. Sallantin marie

    Bonjour
    La question de Turpin reste d’actualité et j’insistai seulement sur ce point:
    Ces intervenants de la vidéo de 2003 validaient le discrédit de la peinture dans le milieu institutionnel (FRACS et enseignement ) par rapport à d’autres pratiques dans un contexte précis au tournant du XXI , le contexte n’a guère changé.
    L’impression qui en ressort est aussi que le sort des peintres et celui de la peinture indiffèrent des soit disant compétents.
    30 ans plus tard, il semble comme vous l’écrivez que le discrédit s’est porté sur eux. On ne les lit plus… leurs contorsions ennuient.

    http://www.sallantin.fr

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